LA LIBRAIRIE DES ABBESSES ET L’ASSOCIATION VERBES

La raison d’être de notre librairie à Montmartre, est d’inventer chaque jour un lieu de “chercherie”, ce beau mot de Baudelaire. Notre simple monnaie d’échange avec les lecteurs serait les mots des écrivains au-delà de ce que nous pouvons penser ou saisir. Ce lieu d’insatisfaction, contradiction et de tourments des écrivains, s’efforce de faire entendre dans notre marche boiteuse une tension entre le réel et l’idéal. Cette maison de l’esprit prête voix aux bruits des sources et des silences d’écrivains. Nous tentons de donner une place à chaque mot, et chaque mot à sa place. 

Notre première action fut, dans ce temps fort de l’année culturelle que sont les rentrées littéraires, d’offrir à un certain nombre d’écrivains “inclassables” un grand mécénat leur accordant visibilité, reconnaissance, ainsi qu’une bourse d’écriture. Le Prix Wepler Fondation la Poste honoré aujourd’hui d’avoir donné depuis vingt-six dans une envergure nouvelle au destin de plus de cinquante auteurs.
Vouloir s’engager en faveur des écrivains, c’est aussi s’intéresser à ceux qui les défendent et les font parvenir aux lecteurs : les libraires.
Notre deuxième action, nationale, s’est  centrée sur ce métier de la librairie car il demeure en France une exception culturelle, protégée par la loi Lang (notamment la disposition concernant le prix unique du livre), mais vulnérable en raison des nombreuses mutations de la chaîne du livre : concentration et rachat des éditeurs indépendants par des groupes financiers, dématérialisation du livre et vente en ligne.
Dans ce tangage qu’on appelle modernité, oui, il fallait un temps pour que la librairie s’exprime, dise où elle était et ce qu’elle vivait.

Depuis vingt-six ans et à ce jour, nous mobilisons pour la San Jordi plus de 500 librairies indépendantes dans le cadre de la journée mondiale du livre et du droit d’auteur sur tout le territoire français et la Belgique et la Suisse francophone. Notre association, chaque printemps, édite à l’occasion de la San Jordi un livre inédit tiré à 25 000 exemplaires et offert au public afin de lui transmettre une culture du métier de la librairie et une histoire de l’édition et du livre papier.
Cette journée est célébrée dans plus de 80 pays et la France – grâce à nous et à la participation des libraires -, a investi cette date.
Au cours de l’année éditoriale,  la San Jordi française et belge est ainsi  devenue  la grande fête de la librairie par les libraires indépendants.

Toutes ces actions, nous les avons lancées avec des partenaires fidèles et fervents.  Pour le Prix Fondation la Poste : la mythique brasserie Wepler et la Fondation la Poste. Pour la fête de la librairie indépendante : Livres Hebdo, les éditions Gallimard et Actes Sud, Thierry Magnier, le Centre national du livre, le Conseil Régional d’Ile de France, la Sodis, UD Diffusion. Nous disposons aussi d’une cellule de complices au cœur de tous nos projets : deux éditrices, Florence Robert et Elizabeth Sanchez ainsi que trois libraires : Olivia Goudard, Philippe Ginesy et Blanche Sarfati.

En résumé, notre association, grâce à ses ancrages territoriaux et professionnels, a su insuffler avec succès un renouveau concret et urgent au sein du monde littéraire.

L’association Verbes est née d’une aventure : la création de la librairie des Abbesses. Cette entreprise, fruit d’une longue maturation professionnelle, a vu le jour dans un quartier qui incitait à toujours plus d’engagement et d’imagination dans la vie des arts. Oui, dans les rues de Montmartre, coule le sang d’écrivains, peintres, poètes, musiciens, qui, souvent ignorés des institutions et défiants envers le “bon goût” de l’établishment, inventaient dans l’isolement d’autres sons, d’autres formes, d’autres couleurs, une autre vie aux antipodes d’une culture de salon divertissante et conservatrice.

C’est en pensant à Max Jacob, Pablo Picasso, Aristide Bruand, Prévert, Céline, Arthur Miller, Toulouse Lautrec, Van Gogh, Satie, et tant d’autres encore que j’ai compris la mission que devait accomplir aujourd’hui une librairie à Montmartre.

Dans un contexte littéraire qui a vu des éditeurs indépendants disparaître et des auteurs très importants être insonorisés par la cacophonie des meilleures ventes, l’heure était venue, comme l’exigeait cette butte rouge qui résistait sous la commune, de s’engager, de “brûler l’enclos”, comme disait René Char…

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